Chercher la réciprocité des communications

Munis de tant d’appareils et de moyens pour communiquer, nous ressentons une impression de supériorité par rapport aux époques qui nous ont précédés, fiers d’avoir enfin résolu une grande énigme. Ce sentiment est réconfortant puisqu’il nous convainc que l’évolution humaine poursuit sa route en nous guidant vers un futur parfait. Or, lorsque les étudiant.e.s entrent dans un cours de littérature au Collégial, ils et elles apprennent que la communication ne consiste pas à transmettre un message clair et limpide à un auditoire. Quelle surprise! La communication humaine, embourbée dans ses paradoxes, empreinte d’émotions et parsemée de non-dits ou d’impensés, revêt une complexité à laquelle l’abondance de machines ne pourra jamais rien. 

On apprend à communiquer d’abord en développant une capacité d’introspection, à laquelle la littérature nous convie. Pour comprendre les autres et savoir leur parler, il faut se connaître, savoir faire le tri à l’intérieur de soi. Les étudiant.e.s au Collégial, en tant que jeunes adultes, arrivent au moment parfait pour explorer plus en profondeur leur monde intérieur. En nous faisant pénétrer dans l’intériorité des autres, la lecture d’œuvres littéraires nous permet de découvrir peu à peu la nôtre et ainsi de nous construire comme individu sensible.  

Comme professeure de littérature, je ressens toutefois de plus en plus le besoin de conjuguer la parole avec la lecture et l’écriture, deux activités plutôt solitaires. La table ronde m’est apparue comme la solution : il suffit de placer quelques personnes autour d’une table, et la magie peut opérer. Rien de plus simple! Et pourtant… Ceux qui n’ont pas la chance de côtoyer les jeunes du Collégial comme moi ne peuvent pas avoir idée des instants de grande beauté qui se déroulent sous mes yeux lors de ces occasions.  

Dans une table ronde, je demande souvent aux étudiant.e.s comme question brise-glace de parler des personnages du roman à l’étude qui les ont marqué.e.s, parce qu’ils et elles les ont aimés ou se sont amusé.e.s à les détester. Ce premier échange autour de leurs choix est une stratégie pour les amener à se raconter à travers le récit qu’ils ou elles font de leur lecture. La littérature, devenue ainsi médiatrice, nous pousse à apprendre à dire notre subjectivité sans toutefois révéler à tout un chacun les secrets et tourments qui nous habitent.  

Afin de pouvoir communiquer efficacement, de manière claire et cohérente, il faut savoir se démener avec ce qui se passe à l’intérieur de soi. La penseuse américaine Bell Hooks, dans son essai incontournable Teaching to Transgress: Education as the Practice of Freedom, fait de la table ronde la pratique pédagogique la plus essentielle. Pour elle, l’enseignement doit donner lieu à un échange véritable entre l’enseignant.e et ses étudiant.e.s, dans lequel le ou la professeur.e s’ouvre à la possibilité d’apprendre de ses étudiant.e.s. C’est à travers cette réciprocité que l’enseignement pourra réellement porter fruit.Nos appareils de communication pourront réellement nous servir grâce à cette présence à soi et aux autres qu’un passage au Collégial peut nous apprendre à affiner.  

Amélie Paquet, professeure de littérature  

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La communication est un concept qui se trouve au centre de notre quotidien. Mais seriez-vous capable de donner une définition précise de ce qu’est la communication ? Et si je vous

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